Aller au contenu principal Activer le contraste adaptéDésactiver le contraste adapté
Fermer

Pourquoi les taux d’intérêt ne vont pas beaucoup monter dans la zone euro
information fournie par Le Cercle des économistes 07/03/2022 à 08:28

Patrick Artus
Patrick Artus

Patrick Artus

Natixis

Chef économiste

https://www.natixis.com/natixis/jcms/j_6/fr/accuei

Si dans un an, ce qui est l'horizon de la BCE, l'inflation est revenue en-dessous de 2% dans la zone euro, la Banque Centrale Européenne n'a aucune raison de monter ses taux d'intérêt plus agressivement que ce qui est déjà anticipé par les marchés financiers. (Crédits photo : Adobe Stock -  )

Si dans un an, ce qui est l'horizon de la BCE, l'inflation est revenue en-dessous de 2% dans la zone euro, la Banque Centrale Européenne n'a aucune raison de monter ses taux d'intérêt plus agressivement que ce qui est déjà anticipé par les marchés financiers. (Crédits photo : Adobe Stock - )

Est-ce que l'offensive russe sur l'Ukraine va pousser à une remontée des taux d'intérêt ? Selon Patrick Artus, la réponse est négative pour plusieurs raisons qui se cumulent.

Les taux d'intérêt à long terme de la zone euro ont déjà beaucoup augmenté : de -0,4% à +0,2% en Allemagne, de -0,1% à +0,7% en France pour les taux d'intérêt à dix ans. Faut-il s'inquiéter d'une hausse beaucoup plus forte des taux d'intérêt, qui aurait un effet négatif sur les marchés d'actions, sur la croissance, qui générerait un problème pour les Etats avec les niveaux élevés de l'endettement public ? Non. Pourquoi ?

D'abord, le scénario le plus probable est celui où l'inflation de la zone euro (5,1% en janvier 2022) va revenir à 2% à la fin de l'année 2022, un peu en dessous de 2% en 2023. Cela résulte de ce que les coûts salariaux unitaires (les salaires corrigés de la productivité) augmentent peu : 1,5% sur un an. Quand on analyse tous les accords salariaux signés pour 2022, on parvient à une hausse de salaire par tête de 2,5% en 2022, certes plus forte qu'en 2021 (1,5%) mais encore assez modeste.

Si dans un an, ce qui est l'horizon de la BCE, l'inflation est revenue en-dessous de 2% dans la zone euro, la Banque Centrale Européenne n'a aucune raison de monter ses taux d'intérêt plus agressivement que ce qui est déjà anticipé par les marchés financiers (entre 3 et 4 hausses de 25 points de base d'ici la fin de 2023).

Le deuxième argument est assez technique : ce qui influence les taux d'intérêt à long terme est le stock d'obligations détenu par la Banque centrale, pas le flux d'achats d'obligations. La BCE va arrêter en 2022 le Quantitative Easing, donc va arrêter d'accroître l'encours d'obligations qu'elle détient. Mais elle ne va pas le réduire, et puisque ce qui compte est le stock détenu et pas le flux d'achats, l'arrêt du Quantitative Easing fera peu monter les taux d'intérêt à long terme sur l'euro.

La demande mondiale de dette sans risque va rester très forte

Le troisième argument résulte de l'observation que la demande mondiale de dette sans risque va rester très forte. Le taux d'épargne du secteur privé et le taux d'épargne total du Monde continent à augmenter, ce qui alimente cette forte demande pour les dettes sans risque.

Elle conduit à de forts achats de dettes publiques sûres (dans la zone euro, Allemagne, France, Pays-Bas, Belgique, Finlande, Autriche) pour les investisseurs internationaux (Banques Centrales non européennes, assureurs, fonds souverains) qui exercent bien sûr une pression à la baisse sur les taux d'intérêt à long terme de ces pays.

Il s'ajoute à ces achats de dettes publiques par les non-résidents les achats « forcés » des banques et des investisseurs institutionnels domestiques. Les achats forcés viennent de la « répression financière », des réglementations qui imposent aux banques, aux assureurs, de détenir des portefeuilles importants de dettes liquides et sans risque. Même si les taux d'intérêt à long terme sont très bas, les banques et les assureurs sont contraints de détenir ces portefeuilles.

Enfin, le dernier argument résulte de la nécessité pour la Banque centrale européenne d'éviter une crise de la dette, comme de 2011 à 2013, dans les pays périphériques de la zone euro. Cette menace pèse aujourd'hui surtout sur l'Italie. L'Italie a une croissance potentielle en volume de 0% contre 1,5% environ dans les autres pays de la zone euro, a une dette publique très élevée (155% du PIB en 2021), et a déjà un taux d'intérêt à 10 ans de 1,9%. Si le taux d'intérêt à long terme de l'Italie passait au-dessus de la croissance en valeur de long terme (2%), alors l'Italie n'assurerait plus la soutenabilité de sa dette publique, et une crise pourrait survenir.

La Banque centrale européenne sera donc perpétuellement contrainte d'empêcher une hausse excessive des taux d'intérêt de l'Italie, ce qui lui impose aussi d'éviter une hausse excessive des taux d'intérêt de l'Allemagne, de la France...

Au total, nous ne sommes probablement pas très loin, aujourd'hui, du point haut des taux d'intérêt à long terme de la zone euro (0,7% environ en France). L'inflation de la zone euro va diminuer, la BCE ne va pas réduire la taille de son bilan, la demande de dette publique, domestique et étrangère, est forte.

De plus, la BCE doit s'inquiéter de ce qu'une hausse trop forte des taux d'intérêt à long terme ferait courir le risque d'une crise de l'Italie. Les taux d'intérêt, dans les pays du cœur de la zone euro, vont donc rester très inférieurs au taux de croissance (en France, par exemple, autour de 1% pour le taux d'intérêt à dix ans, autour de 3,5% pour la croissance en valeur de long terme), donc ne poseront aucun problème pour la croissance, la solvabilité des emprunteurs.

19 commentaires

  • 14 mars 11:15

    Oui, le cercle des économistes est une secte, où l'on pratique l'entregent, et on l'assène des vérités fausses infondés, argumentés par des postulats faux.Ainsi, l'argumentaire de P. Artus est faux, archi-faux; d'ailleurs ses copins, banquiers l'ont bien compris en ayant anticipé depuis des années la situation du pire. Inflation énorme et taux qui vont beaucoup montés.Il faut etre optimiste mais pas débile.


Signaler le commentaire

Fermer

A lire aussi

  • La salle de contrôle d'Euronext, société qui gère la Bourse de Paris ( AFP / ERIC PIERMONT )
    information fournie par AFP 18.08.2025 18:24 

    La Bourse de Paris a fini en baisse lundi, prudente à l'approche de la rencontre entre Volodymyr Zelensky et Donald Trump, en attendant des avancées sur les discussions pour trouver une issue à la guerre en Ukraine. Le CAC 40 a perdu 0,50%, à 7.884,05 points, en ... Lire la suite

  • La Bourse Euronext dans le quartier d'affaires de La Défense à Paris
    information fournie par Reuters 18.08.2025 18:06 

    par Mara Vilcu Les Bourses européennes ont terminé en ordre dispersé lundi, après le sommet entre le président américain Donald Trump et son homologue russe Vladimir Poutine qui n'a débouché sur aucun accord de cessez-le-feu et au début d'une semaine qui s'annonce ... Lire la suite

  • Des cours de la Bourse de Paris affichés dans le bâtiment d'Euronext à La Défense, le quartier d'affaires de Paris, le 10 mai 2024 ( AFP / DIMITAR DILKOFF )
    information fournie par AFP 18.08.2025 18:01 

    Les marchés boursiers européens ont fini dans la prudence lundi, à l'approche de la rencontre entre le président ukrainien Volodymyr Zelensky et Donald Trump, en attendant des avancées sur une éventuelle issue au conflit en Ukraine. La Bourse de Paris a reculé ... Lire la suite

  • Un opérateur à la Bourse de New York, le 15 aôut 2025 ( AFP / TIMOTHY A. CLARY )
    information fournie par AFP 18.08.2025 17:43 

    La Bourse de New York évolue sans grand mouvement lundi, à l'entame d'une semaine marquée par l'absence de données économiques d'ampleur mais avec la publication de résultats de plusieurs grands distributeurs. Vers 15H35 GMT, le Dow Jones était à l'équilibre (-0,01%) ... Lire la suite

Mes listes

Cette liste ne contient aucune valeur.
Chargement...